Défense : l’Occitanie met les bouchées doubles 

Alors que l’actualité internationale et géopolitique s’accélère, avec une Europe mise de plus en plus sous pression par Donald Trump à propos de son rôle de stabilisation en Ukraine, la France revoit ses priorités en adoptant la Loi de programmation militaire sur la période 2024-2030, qui engage 413 milliards d’euros. La Région Occitanie abrite 400 entreprises de la Défense représentant 25 000 emplois directs. Elle mobilise 200 millions d’euros dans la cadre du Plan Souveraineté et Industrie de Défense voté en juin pour accompagner cette dynamique : création d’un fonds dédié à la recherche et au développement, soutien à la filière cybersécurité, développement des compétences et accompagnement des PME à travers un appel à manifestation d’intérêt (AMI) doté de 50 millions d’euros. Lancé courant 2025 et ouvert jusqu’à juin 2026, en partenariat avec la DGA et l’Agence de l’Innovation de Défense (AID), cet AMI sera destiné aux entreprises de la défense et aux entreprises civiles. Il permettra d’accompagner des projets de R&D, d’accueil industriel et de montée en capacité des 430 PME intégrées dans acteurs de la Base Industrielle et Technologique de Défense Occitanie (BITD).

Les entreprises de la Défense montent en puissance 

Dans ce contexte, les entreprises occitanes accentuent leurs efforts sur le secteur de la Défense. Par exemple, le constructeur de drones Delair (Toulouse) va doubler sa capacité de production, avec le soutien de la Banque des Territoires et de la Direction générale de l’armement (DGA).
Autre signal fort, l’arrivée de Tekever, groupe portugais spécialisé dans les domaines de défense et de sécurité via des systèmes autonomes pilotés par l’IA, qui construit un centre d’excellence sur les systèmes autonomes à usages de défense et de sécurité à Cahors (Lot). Le site industriel sera opérationnel fin 2025 avec à la clé la création de 100 emplois d’ici 2030. 

Par ailleurs, les entreprises jouent la carte de la dualité en produisant à la fois pour des marchés civils et militaires. À Sète (Hérault), Forssea Robotics (20 salariés, 2 M€ de CA), spécialisée dans la fabrication de systèmes sous-marins intelligents pour les industries offshores, observe une hausse de la demande du marché de la Défense. L’entreprise héraultaise a signé en 2024 son premier contrat défense en livrant à la DGA « un robot sous-marin d’inspection et d’intervention légère, relié au navire avec un câble, permettant une communication en temps réel », explique Gautier Dreyfus, PDG de Forssea Robotics. 

Des opportunités pour les entreprises 

D’autres entreprises voient dans le secteur de la défense des opportunités. C’est le cas de Menaps (30 salariés, Toulouse) qui a développé avec les sapeurs-pompiers de l’Aude l’innovation Fire Eagle, qui consiste à équiper les drones de caméras thermiques dotées d’une IA afin de détecter les feux de forêts. « Nous avons de la demande en Angola, en Guinée, au Maroc, en Tunisie ou encore à Malte, que ce soit sur la détection des feux de forêts, mais aussi pour utiliser notre IA pour des questions de sécurité et de sûreté dans des zones tendues », confie Hamdi Chaker, PDG de Menaps, qui projette de lever entre 750 000 euros et 1 million d’euros d’ici fin 2025 pour accélérer son développement à l’international. 

Des métiers en tension

Mais la tension sur les compétences freine parfois les ambitions. « Le forgeron est impossible à trouver. Nous recrutons des personnes que nous formons en interne sur une année », confie Jérôme Garnache-Creuillot, PDG d’Europlasma, propriétaire des Forges de Tarbes (Hautes-Pyrénées), qui produit des corps d’obus de 155 mm. L’entreprise a investi 7 millions d’euros dans son site depuis 2021, avec un objectif de montée en puissance : 180 000 obus par an d’ici 2030, contre 8 000 en 2022. Même constat chez Forssea Robotics, à Sète : « Il nous faut dix ans pour former un technicien », explique Gautier Dreyfus.

Afin de permettre à l’écosystème de la défense de s’aligner avec la feuille de route des armées, la 2ème promotion du programme « Accélérateur Défense » sera lancée le 8 octobre 2025. Destiné à proposer un accompagnement sur-mesure pendant 18 mois à 25 nouvelles entreprises, PME et ETI, stratégiques de la base industrielle et technologique de défense Occitanie, dans leur montée en cadence, la cybersécurité et le recrutement, il est porté par le Ministère des Armées, la Direction Générale des Armées (DGA) et BPI France.

En Occitanie, il est relayé par le Cluster Primus à Toulouse, regroupement de 56 acteurs industriels centré sur l’innovation et la compétitivité dans les secteurs de la défense, la sécurité et la sûreté.